Enseignement des langues par groupes de niveau

 

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Ghalib Al-Hakkak - agrégé d'arabe, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Osons l’enseignement des langues par groupes de niveau

L’enseignement des langues étrangères en France mérite d’être revu de fond en comble, du collège à l’enseignement supérieur. L’évolution du monde l’exige si nous voulons que nos enfants s’y épanouissent et jouent un rôle notable.

La clé de voûte d’une réforme possible est l’introduction dès le collège de groupes de niveau en remplacement des groupes actuels organisés par classes d’âge. Décloisonner les années et regrouper les élèves par niveau se justifie en langues pour mettre un terme à des situations multiples d’échecs, pour en
finir avec des classes dont l’hétérogénéité provoque le mécontentement des élèves comme celui des professeurs. Il est grand temps de tenir compte, en langues, des acquis et des aptitudes de chaque élève, de respecter son rythme et ses attentes.

Osons cette réforme pour que les meilleurs élèves puissent tendre vers l’excellence et que les élèves qui ont des difficultés puissent malgré tout progresser dans un groupe adapté à leurs besoins.

Osons donner du sens aux niveaux en alignant les paliers progressifs sur le Cadre de référence en usage désormais partout en Europe. Nous l’utilisons pour évaluer les acquis, faisons-en un outil d’organisation de l’apprentissage.

Osons une offre de langues étrangères moderne, consciente des enjeux et de l’évolution du monde. Arrêtons de faire de l’anglais un alibi pour ne pas préparer nos enfants, décideurs des années 2050, à maîtriser d’autres langues majeures comme le chinois (mandarin), le japonais, l’arabe, le russe, le portugais, le hindi, le turc, le farsi… Une organisation par groupes de niveau permettrait d’avoir des effectifs suffisants pour toutes les langues et dans une large majorité d’établissements, y compris dans les zones défavorisées et les zones rurales.

Osons une réforme pédagogique qui redonnerait le moral aux enseignants toujours désireux de voir concrètement à quoi servent leurs cours préparés avec dévouement et espoir. Osons un pacte avec les enseignants de langues pour leur garantir des emplois du temps connus bien avant l’été de sorte qu’ils puissent organiser leur vie, leurs activités, leurs engagements de l’année scolaire ou universitaire à venir. Osons leur proposer de meilleures conditions de travail avec des équipements permettant d’utiliser réellement le numérique, de travailler en équipe, dans un seul établissement ou dans un réseau de trois ou quatre collèges, lycées ou université dans un même secteur.

Osons donner une place plus active aux étudiants étrangers en augmentant le nombre de postes d’assistant dans le secondaire et dans le supérieur.

C’était une promesse présidentielle que de penser à la jeunesse durant ce quinquennat. La maîtrise de plusieurs langues étrangères serait un pas de géant pour chacun des jeunes d’aujourd’hui. Seuls les groupes de niveau associés à une offre large de langues, un usage méthodique du numérique et des contacts suivis entre jeunes français et jeunes étrangers résidant en France peuvent sortir nos formations linguistiques d’une frustration massive et un sentiment de gâchis regrettable (1).

Janvier 2014
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(1) Cette réflexion est largement inspirée par les étudiants de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Une version détaillée de ce
plaidoyer est accessible plus bas sur cette page.