L'arabe en ligne pour les francophones

 

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Ghalib Al-Hakkak - agrégé d'arabe

Divagations 1 : textes publiés sur facebook

Dans un ordre chronologique inversé

L'insomnie (الأرق) n'est pas toujours un problème. Cela me permettra par exemple demain de suivre en direct les résultats du Super Tuseday. Mais ce soir, ou plutôt ce matin, je lui découvre un autre intérêt : pouvoir regarder une chaîne de qualité, France 24. D'où une question que j'aimerais poser au CSA : pourquoi cette chaîne ne diffuse-t-elle pas dès 18h, par exemple ? Si on dit qu'il n'y a pas de place dans la journée, je pourrais les aider : sur la 9 et la 11, il y a des émissions débiles qui pourraient trouver place la nuit. Sur la 21, on transmets des parties de pétanques en milieu de journée. Ce serait excellent à minuit pour lutter contre l'insomnie. Non ?

3 mars 2020

La traduction automatique frappe parfois très fort. Aujourd'hui, j'ai relevé un détail intéressant dans quelques sites rapidement visités. Cela se manifeste dans les citations, ou plus exactement dans les propos improvisés oralement. Et ce sont les tics de langage que la machine traduit littéralement. Imaginez que la traduction d'un texte arabe ponctué de يعني se trouve truffé en français de "c'est-à-dire". Cela détruirait le résultat. Il en est de même lorsqu'on traduit systématiquement les tics venant du français. On trouve ainsi des ولكن حسناً / فقط هكذا / ولكن هكذا / هكذا الكل / etc. Du coup, je me demande s'il ne faut pas que les Arabes apprennent bien l'anglais et le français pour comprendre désormais ce qu'ils lisent dans la presse... en arabe !

2 mars 2020

Normalement, le Président de la République est bien informé. Il n'aborde pas un sujet important en improvisant, même sur les détails. Normalement. Mais l'autre jour, j'ai bien écouté son intervention sur le "séparatisme" qui menace en France. Laissons de côté tous les aspects sensibles de son discours. Je voudrais juste signaler un détail qui concerne la langue arabe, citée parmi d'autres langues "d'origine". Je voudrais juste témoigner : pendant 26 ans d'enseignement à l'université, dans mes groupes d'initiation, il y avait une majorité écrasante de jeunes n'ayant aucun lien familial avec le monde arabe. Appelez-les comme vous voulez : "de souche", "d'origine française", "gaulois", "autochtones"... Bref, des jeunes qui ont compris ce que les hommes et femmes politiques refusent de voir ou d'admettre : la France vit dans un monde multiple, qui s'ouvre à elle, et ses jeunes regardent souvent un horizon vaste, parfois lointain. Les Arabes sont les voisins de la France et une part d'elle. Je ne sais pas qui fait croire au président de la république que l'arabe, le turc, le portugais, le hindi, le kurde, le farsi... n'intéressent que les enfants d'origine étrangère. Tiens ! D'un coup, je pense à Sylvestre de Sacy. Je ne sais pas pourquoi !

21 février 2020

NB : Je dois préciser ici que beaucoup de jeunes Français, de toutes origines, se demandent pourquoi il faut attendre la fin du lycée pour accéder, à l'université, à l'enseignement de l'arabe. On aimerait bien que le ministre de l'Education y trouve une réponse convaincante, ou du moins une explication franche.

"C'était mieux avant". Une expression qu'on entend parfois chez les râleurs et les rabat-joie incurables. Mais, parfois, c'est vrai. Regardez comment on évoque en arabe les nombres élevés. Il n'y a pas longtemps, pour atteindre le sommet on évoquait le مليون . D'où quelqu'un de richissime est qualifié de مليونير . Aujourd'hui, toujours chez les Arabes, on parle de بليون / مليار/ تريليون . Je ne sais pas s'il y a d'autres termes encore. On sait que c'est beaucoup, mais combien exactement ? Inutile d'y penser : on ne les aura jamais. Mais comment faisaient les Arabes au Moyen-Âge ? Tout simplement en ajoutant ألف . Donc مليار / بليون = ألف ألف C'est donc très simple et clair. Et un ترليون = ألف ألف ألف . C'est ainsi que l'on donnait par exemple la recette fiscale de l'empire à l'époque abbasside, sauf erreur de ma part. Le seul problème de ce système est la possible erreur de frappe, ou autrefois l'étourderie d'un copiste. Un petit ألف de trop et on tombe dans les pommes. Finalement, je ne sais pas si c'était vraiment mieux avant, mais un تريليون ne me parle toujours pas.

21 février 2020

Je ne sais pas vous, mais moi, je n'y arrive pas. Le parlement français nous dit que le Sionisme, c'est bien. C'est normal. Mais plus j'y regarde plus j'y vois de l'obscurantisme pur et dur, en tout cas, aujourd'hui. Dans toutes ses déclinaisons : néo, évangélique, politique... Il relève, me semble-t-il, d'un colonialisme violent, d'un autre âge. Disons que la résolution du parlement français, si elle n'est pas retirée, devrait être expliquée en donnant la parole avant tout à ceux qui souffrent du sionisme : les Palestiniens.

7 février 2020

Je découvre un autre aspect de l'influence des langues occidentales sur la langue arabe. C'est un titre que j'ai trouvé sur le site d'aljazeera :
مجلس الشيوخ يستأنف جلساتها.. ترامب يصف محاكمته برلمانيا بأعظم ملاحقة سياسية
On y voit le pronom personnel attaché au mot جلسات accordé au féminin. Et n'importe quel arabophone s'arrête ici et se demande où se trouve l'erreur. Car le مجلس auquel renvoie normalement le pronom personnel est masculin. Eh ben, non ! Il renvoie (plutôt : envoie) à ce qui vient après : محاكمة . Or la grammaire arabe n'a pas à ma connaissance prévu une telle évolution. Si, en poésie, où tout est permis, ou presque. Mais là on est dans une littérature d'information. D'ailleurs, dans les grammaires d'arabe rédigées en français, il va falloir chercher un nouveau terme technique pour accompagner le "pronom de rappel". Progrès oui catastrophe ?

22 janvier 2020

Tout le monde connaît الأشهر الحرم non ? Au cas où... c'était chez les Arabes, avant l'islam, usage adopté par l'islam, et oublié depuis belle lurette, quatre mois pendant lesquels on arrête la bagarre. Autrement dit, quatre mois, cent-vingt jours, pour circuler tranquillement en Arabie sans craindre d'être attaqué par un clan méchant ou un autre affamé. Ceux-là doivent attendre la fin de cette période de paix sociale. C'était ذو القعدة / ذو الحجة / محرم / رجب . Cela correspondait à la saison du pèlerinage et des foires de commerce. Si la SNCF existait à l'époque, cela aurait été une période de grande activité, comme pendant les vacances en France. Si je vous parle de ça, c'est parce que je viens de lire, le chanceux retraité que je suis, que les incertitudes recommencent sur la validation du premier semestre à l'université. Certains enseignants, mobilisés (mais pas pour assurer les cours), prônent la rétention des notes, d'autres, plus affamés, appellent à bloquer l'accès aux salles d'examen. Ce n'est pas nouveau. On a même vu un député il y a plus d'un an participer à une action visant à bloquer l'accès à la Maison des Examens à Arcueil. Alors, les autres députés, pourraient peut-être s'inspirer des Arabes. Pourquoi pas. Et de décréter que quatre mois de chaque année seront sans grève, sans manif, sans contestation, et aussi sans nouvelles réformes. Les actions pourraient reprendre de plus belle après. Mais quels mois ? Je propose décembre et janvier et un peu plus tard mai et juin. Juste une idée. Il n'y a pas de quoi !

20 décembre 2019

Parfois, la lecture d'un titre crée la curiosité et invite à lire l'article. Certains médias en abusent tellement que cela finit par détourner les lecteurs. Mais parfois, dans un journal qui ne pratique pas ce genre de racolage, on peut tomber sur un titre intriguant, comme celui que je viens de lire sur le site de الجزيرة . Ce titre dit : شاهد.. كيف خسر التركي غوناي قاقات 30 كيلوغراما؟ . Je suis resté un moment à me demander pourquoi ils ne précisent pas "30 kg" de quoi. De drogue ? D'or ? De caviar ? Avant de me rendre compte que c'est encore la machine traductrice qui a frappé, ou un de ses admirateurs. Le problème est dans le verbe خسر qui devient dans le corps du texte فقد . Toujours le même problème. En retraduisant en français, ou en anglais, on comprend de quoi il s'agit. En réalité, pour qu'un Arabe comprenne immédiatement, le journal aurait dû utiliser le verbe تخلص من (se débarrasser de). Parce que les deux autres verbes qui traduisent "perdre" en général ne conviennent pas ici, car ils évoquent une perte regrettable. Bref, maintenant on le sait. La machine de traduction pénètre désormais dans nos cerveaux. Et bientôt, quand vous écrivez une lettre à vos grands-parents, faites relire le texte par un vieux pour voir s'il comprend votre littérature. Et si vous vous demandez si le phénomène est limité à Al-Jazeera, rassurez-vous : c'est pire ailleurs.

18 décembre 2019

Cette fois, je suis sérieux à 100 %. J'ai une idée. Pour les juristes. Mais tout le monde peut y réfléchir et dire ce qu'il en pense. Il y a un usage dans la justice française qui consiste à réduire la peine des condamnés en vue d'une libération anticipée pour bonne conduite. Il y'a des verrous quand même. Cela peut intervenir au bout d'un certain nombre d'années, selon la durée de la peine. Parfois c'est un peu plus de la moitié, parfois un peu moins. Alors voilà ! Mon idée este e remplacer la "bonne conduite" par l'obtention d'un diplôme. Selon la durée de la peine et la nature du délit, une large palette doit être mise en place, allant de l'obtention du niveau C2 en chinois à un M2 en philosophie avec mention TB, etc. En cas de récidive, au lieu d'une seule langue maîtrisée avec une certification niveau C2, le juge peut en mettre deux ou trois, de familles linguistiques différentes. Et pour tous, pas de sortie s'ils n'obtiennent pas 20 / 20 dans une dictée française de haut niveau. Dans une telle configuration, et à supposer qu'une grande majorité des condamnés jouent le jeu, les récidivistes pourraient devenir moins violents, plus raffinés dans leurs méfaits. Ce serait bien, non ? Sérieusement !

18 décembre 2019

Pour se changer les idées, quand on est contrarié par une banalité, il y a entre autres remèdes, l'écoute de ce morceau unique : الليلة الكبيرة (Le Grand Soir). C'est une opérette de marionnettes composée par صلاح جاهين et mise en musique par السيد مكاوي . Elle recrée par une succession de courtes séquences l'ambiance de la veille du Mawlid (anniversaire du Prophète, le Noël musulman en quelque sorte) que les Egyptiens savent sans doute mieux fêter que d'autres. La page Wikipédia en donne les paroles et quelques indications sur les participants dont quelques chanteurs de renom. Bonne écoute : http://www.al-hakkak.fr/chetexos/AllelalKibira.mp3

4 décembre 2019

Tout le monde a un jour ou l'autre besoin d'autrui. Certains n'hésitent pas à solliciter quelqu'un d'autre pour un service. D'autres craignent la réaction de la personne sollicitée. La déception éventuelle pourrait être lourde à supporter. Cela dépend de la sensibilité de chacun. Alors, je ne sais pas comment vous êtes quand on vous appelle à l'aide. Du genre à dire على العين والراس ou ولا يهمك ou je ne sais quelle expression qui mettrait tout de suite à l'aise l'auteur de l'appel, ou bien vous êtes plus mesurés : qu'est-ce se passe ? C'est urgent ? Là, tout de suite ? etc. Ou carrément franc : ça tombe mal. Je suis incapable de m'aider moi-même. Etc. Je parle de tout cela parce que je suis tombé sur un vers de زهير بن أبي سلمى qui a vécu au VIe siècle et que je trouve magnifique et en même temps cruel parce que tout de suite, on se met à se demander : qui parmi mes connaissances est ainsi ?
تراه إذا ما جئته متهللاً / كأنك تعطيه الذي أنت سائله

2 décembre 2019

NB : désolé pour les non-arabisants, je n'ai pas traduit le vers en question. Ce poète qui avait vécu presque 90 ans disait en parlant de quelqu'un "Quand tu l'approches, tu le vois tellement joyeux et heureux, que tu as l'impression de lui apporter un cadeau au lieu de lui demander son aide". C'est comme si aujourd'hui quelqu'un vous disait : je te remercie de me choisir, moi, pour t'aider !

Amazon... Amazon... Amazon... Il n'y a que ça sur toutes les lèvres. Le politiquement correct impose d'en dire du mal. Alors, par incorrection j'aimerais parler de la campagne, des villages, de la province et... d'Amazon. Chaque tournée de notre facteur qui passe au village apporte une vingtaine de colis envoyés par Amazon. Imaginons un peu ce qui se passerait si ce service n'existait pas. Réaménagement de la Poste avec des suppressions de postes et de tournées. Déplacement vers la ville d'une vingtaine de voitures individuelles pour aller tenter de trouver les articles voulus. Un nombre difficile à établir de fournisseurs - j'en suis un - qui cesseraient leurs activités. Y a-t-il un équivalent "français", bien français, pour pouvoir continuer à accéder sans carburer à des produits culturels, entre autres ?

30 novembre 2019

Je n'avais jamais réussi à écouter attentivement un bulletin météorologique à la télé. Et soudain, hier, je me suis dit qu'il était temps de respecter les présentateurs et de les écouter vraiment. Et là, j'avoue avoir été surpris par l'inutilité du texte qu'ils prononcent. C'est curieux. On dirait un texte pour la radio. Le présentateur décrit l'image en répétant des chiffres et en baladant sa main sur la carte de la France. Aucun intérêt. On est capable de lire les chiffres et on sait où se trouve la Bretagne, les Alpes, le Nord, etc. Et puis chacun regarde sa région. Et quand les images défilent pour montrer l'évolution dans la journée ou dans la semaine, on voit bien ce qui se passe. En plus, on a toujours l'impression que le présentateur est stressé par le chrono. Jadis, Gilliot-Petré avait innové en ajoutant des expolications sur des termes techniques alors que personne ne savait ce que c'était un cumulus, par exemple. C'était intéressant. Alors, j'ai envie de dire aux chaînes : engagez des historiens et des géographes pour animer vos bulletins de météo. Au lieu de citer des noms de villes, toujours les plus grandes d'ailleurs, on pourrait signaler la ville natale d'une célébrité dont c'est l'anniversaire. On pourrait évoquer des monuments, des lieux phares du patrimoine, des hauts lieux touristiques ou non. On pourrait évoquer des écarts de températures entre minimale et maximale. Cet écart est aussi grand partout ? Pas sûr. On pourrait glisser une allusion à la température du jour dans les dom-tom. On peut comparer avec la température de la même date un an plus tôt, etc. Et si une chaîne veut créer l'événement, elle pourrait demander au présentateur et à la présentatrice de changer de costume tous les jours pour porter un habit traditionnel d'une région de France ou du monde. Et pour créer le buzz, un jour, une présentatrice voilée, à l'iranienne si possible, avec une mèche visible de cheveux et le lendemain, ou la veille habillée en bonne sœur !

29 novembre 2019

On vit à l'ère du buzz. Vous pouvez être le plus grand génie de l'époque : personne, sans le buzz, ne s'intéressera à vous. Mais ce mécanisme a un défaut : il faut toujours aller plus loin. Et un jour, forcément, c'est la panne. Regardez le président américain. Il commence à faiblir. regardez Eric Zemmour. C'est plutôt fade ce qu'il nous sert depuis un moment. L'Alain Finkelkraut, aussi. Et j'en oublie. Alors j'ai quelques idées pour les relancer. Zemmour ferait un tabac pas possible s'il annonçait un jour qu'il se convertissait à l'islam. Finkelkraut deviendra une idôle des jeunes s'il se reconvertissait parolier pour un groupe de RAP. Et Trump pourrait totalement faire oublier l'enquête de l'impeachment en créant deux nouveaux Etats : New Palestine et New Israël dans le Nevada, ou dans le coin, au centre des USA. Allez, un petit effort, tous. On s'ennuie là.

23 novembre 2019

Il arrive à tout le monde, ou presque, de fredonner une chanson, peut-être rarement en étant sûr de bien reproduire la mélodie. On peut même en cachette s'essayer à imiter quelques airs d'opéra chantés par un ténor. Alors, j'ai envie de vous proposer d'essayer une imitation d'Umm Kulthûm dans رق الحبيب . Le début, surtout. D'ailleurs, l'enregistrement que je mets ici me paraît supérieur à d'autres de cette même chanson. On y remarque la pureté de sa voix quand elle prolonge une même note pour réaliser le î dans habîb. Une régularité durant ce long î qui est impressionnante et une chute divine ensuite. On remarque aussi dans cet enregistrement le silence du public, qui attend la fin de la séquence avant d'applaudir. Un respect pour tous les artistes qui sont sur scène. Cela ne durera pas. Les enregistrements des années 60-70 montrent un public parfois trop "enthousiaste" dont les applaudissements et les cris couvrent parfois la voix du chanteur à la clôture de chaque séquence. Le morceau qui suit est la première moitié de رق الحبيب : http://www.al-hakkak.fr/chetexos/Raqq-al-habib.mp3

27 septembre 2019

J'ai remarqué chez plusieurs amis arabisants français une certaine préférence, quand il s'agit d'évoquer la cantillation ou la récitation du Coran en public, pour le lecteur égyptien محمد صديق المنشاوي et je n'ai compris le pourquoi de cette préférence qu'à l'écoute des messes de Bach, de Haendel, de Mozart. Personnellement, je préfère de loin أبو العينين الشعيشع . Si l'on poursuit la comparaison sur le terrain de la musique classique, sacrée ou non, je dirais que le travail de الشعيشع se rapproche davantage de l'œuvre de Beethoven, de Puccini, de Rossini, de Giacometti, de Verdi. Du coup, je me demande si ce n'est pas la raison qui me fait aimer beaucoup d'airs d'opéra du XIXe. En somme, avec المنشاوي personnellement, je trouve une atmosphère sublime, raffinée, subtile, alors qu'avec الشعيشع j'entends une œuvre sculptée note par note. Etant réac de nature, j'ignore tout de la nouvelle génération de lecteurs. Tant pis pour moi.

17 août 2019

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